Une application pour signaler l’existence de communautés indigènes sur les cartes du Cerrado brésilien

Photo d'illustration ©InaeMiranda de Pixabay

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Tô no Mapa (« je suis la carte ») est une application pour smartphone qui permet aux communautés autochtones du Cerrado brésilien d’enregistrer où elles se situent sur la carte et de signaler les conflits présents autour d’eux, telle que la pollution des sources d’eau.

Le Cerrado est une vaste savane tropicale qui couvre plus de 20 % de la masse continentale du Brésil et qui traverse le centre du pays, bordé à l’ouest par l’Amazonie et à l’est par la forêt atlantique. Cette zone est composée de dizaine de types d’écosystèmes différents, allant des zones humides aux forêts tropicales. Le Cerrado abrite 5 % de la biodiversité mondiale, soit des milliers d’espèces uniques. Près de la moitié de la végétation indigène du Cerrado a été perdue au profit de l’agriculture au cours des 50 dernières années et le développement de la savane est étroitement lié à l’ascension du Brésil en tant que principal exportateur de soja et de bétail. Principalement concentrée au sud du pays, la frontière agricole gagne du terrain et se déplace progressivement vers le nord dans une région qui contient certaines des dernières étendues de végétation indigène du Cerrado. Ici, l’agrobusiness entre de plus en plus en conflit avec les peuples et communautés indigènes, dont beaucoup n’ont pas de titres de propriété officiels ou ne figurent même pas sur les cartes nationales. Le site d’informations Mongabay rapporte que lorsque le gouvernement a proposé de développer la région de Matopiba au nord du pays en une nouvelle région agricole en 2015, les cartes étaient essentiellement vides et indiquaient que personne n’y vivait, alors que des centaines de communautés prospéraient dans cette zone.

De là est née une nouvelle initiative entre ces communautés « invisibles » et deux ONG brésiliennes : l’IPAM (The Instituto de Pesquisa Ambiental da Amazônia) et l’ISPN (Instituto Sociedade, População e Natureza). L’idée est de donner les outils nécessaires aux communautés pour se signaler sur la carte ainsi qu’indiquer l’existence de sites sacrés et les zones de conflits. Le résultat du projet a été la création de l’application Tô no Mapa qui se traduit par « je suis sur la carte ». « Si tout le monde peut télécharger l’application, les informations ne peuvent être ajoutées que par les communautés via des protocoles communautaires spécifiques », indique Mongabay. Dans une interview accordée au site d’informations, Francisco José Souza Rocha, un technicien de recherche à l’IPAM qui a aidé à concevoir l’application, explique « qu’une partie du processus de cartographie consiste à se réunir en tant que communauté, à discuter de l’opportunité de cartographier leurs communautés et de ce qu’ils veulent cartographier, ainsi que rédiger un procès-verbal et le transmettre à l’application en indiquant qu’ils sont d’accord avec cela ». Tô no Mapa comprend des modèles pour aider les communautés à rédiger ces fameux procès-verbaux ainsi que des vidéos sur la manière d’utiliser efficacement l’application.

Même si la carte n’est pas officielle, les développeurs de l’application affirment que le fait de donner aux communautés le pouvoir de recueillir et d’ajouter des informations directement, et de créer une vaste base de données sécurisée, constituera un outil utile pour affronter le gouvernement et, à terme, contribuer à garantir leurs droits fonciers. L’initiative est également une étape cruciale pour le maintien de la biodiversité qui subsiste dans le Cerrado, d’autant que les peuples indigènes font un travail essentiel de conservation de faune et flore dans la zone.