La « viande sauvage aquatique » au menu de la Convention de Bonn (3 mn)

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La dernière Convention sur la conservation des espèces migratrices appartenant à la faune sauvage s’est penchée sur un possible encadrement de la chasse et de la consommation de la viande sauvage aquatique, mais a échoué à prendre des mesures concrètes.

La consommation de la « viande sauvage aquatique » et ses conséquences sur l’environnement et la santé humaine ont été au centre de la dernière Convention sur la conservation des espèces migratrices appartenant à la faune sauvage (CMS), ou Convention de Bonn, qui a réuni des délégués de plus de 80 pays à Gandhinagar, en Inde, et s’est terminée le 22 février. Ils ont notamment convenu d’élaborer un plan d’action pour la viande sauvage aquatique en Afrique de l’Ouest. En plus de la viande de brousse terrestre, et en conséquence de la surpêche qui entraîne la diminution des stocks de poissons, la dépendance des populations à l’égard de la viande sauvage aquatique – baleine, dauphin, lamantin, tortue ou encore crocodile – s’accroît dans les régions tropicales, tempérées, subarctiques ainsi que dans l’Arctique. Dans le monde, environ 100 000 petites baleines, dauphins et marsouins d’au moins 56 espèces sont tués chaque année, selon un rapport de 2019 établi par de multiples ONG de conservation. Des recherches récentes montrent que le nombre de petits cétacés tués lors de chasses est en augmentation, notamment dans des endroits tels que le bassin de l’Amazone et les eaux proches du Ghana. [ihc-hide-content ihc_mb_type= »show » ihc_mb_who= »1,2,3,4,5″ ihc_mb_template= »1″ ]

Certaines chasses aquatiques sont illégales, comme le braconnage extensif des tortues de mer dans la région du « Triangle de Corail » en Asie du Sud-Est. Cependant, une grande partie de cette activité est légale, de nombreux pays n’ayant pas de législation protégeant les espèces espèces concernées. Par exemple, de nombreuses nations insulaires des Caraïbes, telles que les îles Grenadines et celle de Saint-Vincent n’ont pas de lois protégeant les petites baleines et les dauphins et en chassent plusieurs centaines par an.

Manger de la viande sauvage aquatique, en plus de mettre en danger la survie des espèces, présente de sérieux risques pour la santé publique: les cétacés sont des prédateurs qui concentrent dans leurs tissus des micro-plastiques et des polluants, tels que le mercure, à des taux bien supérieurs à ceux reconnus sans danger par l’Organisation Mondiale pour la Santé (OMS) et qui remontent ensuite la chaîne alimentaire jusqu’aux hommes.

Les efforts visant à limiter la chasse aquatique locale ont été pour l’instant largement inefficaces. Certains écologistes préconisent désormais une approche qui s’attaque aux causes profondes du problème, telle que la surpêche industrielle qui fait disparaître les poissons dont se nourrissent normalement les communautés locales. En Afrique de l’Ouest, elle est importante : les navires de pêche industrielle y sont plus de 20 fois plus performants que les pêcheurs locaux, selon un rapport d’OceanCare datant de 2016. Par ailleurs, certains pays disposant d’une importante flotte de pêche étrangère, comme la Chine et le Japon, ne sont pas signataires de la CMS, de sorte que les navires battant leur pavillon ne sont pas tenus de respecter les dispositions de la convention.

Le premier examen du statut des espèces inscrites sur la liste de la CMS, publié au début du mois en préparation de la conférence, montre que les populations de la plupart de ces espèces sont en baisse. Malgré cela, les efforts pour renforcer la CMS ont échoué lors de la conférence : une proposition de résolution qui aurait élargi le mandat de la convention pour inclure des restrictions commerciales sur les espèces menacées d’extinction n’a pas été adoptée à cause de l’opposition des délégations de l’Union Européenne et australienne, et a été remplacée par un appel à la recherche sur la question. Le dernier jour de la conférence, les parties ont publié la déclaration de Gandhinagar appelant à l’inclusion des espèces migratrices et du concept de « connectivité écologique » dans le cadre adopté lors de la conférence des Nations unies sur la biodiversité en octobre prochain.

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