Plus que 30 ans avant que le Cerrado s’effondre ?

Photo d'illustration ©InaeMiranda de Pixabay

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Une étude publiée dans la revue Global Change Biology montre que le Cerrado Brésilien – un des points chauds de la biodiversité mondiale et une source vitale d’une grande partie de l’eau du pays – pourrait s’effondrer dans moins de 30 ans si l’agrobusiness continue de progresser au rythme actuel.

Le Cerrado brésilien se situe au sud-est de la forêt amazonienne. Il s’agit d’une zone de 2 millions de km2 qui englobe tout ou une partie de 10 États brésiliens. Point chaud de la biodiversité mondiale et source vitale en eau de ces États, le Cerrado est fortement menacé. Une nouvelle étude publiée dans la revue Global Change Biology montre que ce milieu pourrait s’effondrer dans moins de 30 ans si l’agrobusiness continue de progresser au rythme actuel. L’étude analyse comment la conversion de la végétation indigène en terres cultivées accélère le changement climatique dans un milieu dont près de la moitié de la superficie a déjà été convertie en plantations de soja, de maïs et de coton, ainsi qu’en pâturages pour le bétail.

Les auteurs remarquent que le Cerrado d’aujourd’hui est beaucoup plus chaud et sec qu’il ne l’était autrefois. Des augmentations mensuelles de 2,24°C des températures maximales moyennes ont été observées entre 1961 et 2019, avec des pics de 4°C au mois d’octobre. Si cette tendance persiste, la température sera supérieure de 6°C en 2050 par rapport à 1961, indique le document. Dans cette zone, la saison sèche dure approximativement de juin à septembre. Pendant les mois où il y a peu ou pas de pluie, les arbres du Cerrado utilisent leurs racines profondes pour puiser de l’eau dans des aquifères situés jusqu’à 15 mètres sous terre. Cela permet aux plantes de continuer à faire de la photosynthèse et à libérer de l’eau dans l’atmosphère par transpiration et évaporation, même pendant la saison sèche.

Cependant, avec l’accélération de l’agrobusiness, de nombreux arbres ont été remplacés par des cultures. Gabriel Hofmann, docteur en écologie et étudiant de troisième cycle en géographie à l’Université fédérale de Rio Grande do Sul (UFRGS) et auteur principal de l’étude explique au site d’informations Mongabay que « pendant la saison sèche, les agriculteurs ne plantent rien dans le Cerrado. Ils laissent le sol nu ou [couvert] de matière organique morte. Comme il n’y a pas de plantes pour absorber l’énergie du soleil et faire la photosynthèse, toute cette énergie est utilisée pour chauffer l’air et la température augmente ». Les chercheurs ont alors précisé que ce processus de « chauffage-séchage » déclenche un effet en cascade qui risque de faire disparaître une grande partie de la biodiversité du Cerrado.

En effet, Mongabay souligne que les petites plantes, qui n’ont pas de longues racines pivotantes, dépendent de la rosée comme unique source d’eau pendant la saison sèche. La rosée qui se forme généralement la nuit, lorsque des températures plus fraîches, provoquent la condensation de l’humidité atmosphérique (après être passée dans l’air par transpiration et évaporation des arbres aux racines profondes). Mais aujourd’hui, avec moins d’arbres et moins de vapeur d’eau dans l’air, ainsi que des températures diurnes et nocturnes plus élevées, la rosée est un phénomène de plus en plus rare. Les plantes risquent alors de mourir desséchées au soleil. Les insectes comme les abeilles, les fourmis ou encore les araignées sont, eux aussi, très dépendants de cette rosée. Or, sans les insectes, « l’écosystème s’effondre », précise Hoffman qui prévoit que la biodiversité du Cerrado s’écroule complètement dans une trentaine d’année.

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