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Trois questions à Charlotte Meunier, présidente de Réserves naturelles de France.

ANES : Au congrès de Réserves naturelles de France (RNF), qui s’est achevé le 8 juin à Le Monêtier-les-Bains (Hautes-Alpes), vous avez été élue présidente de cette structure qui fédère les gestionnaires de près de 350 réserves françaises. Quel est votre feuille de route pour ce mandat ?

Charlotte Meunier : je veux avant tout conserver à la fois la dynamique de ce réseau, et la dynamique inter-réseaux qui a été mise en place au cours des années écoulées. Ce congrès, nous l’avons organisé pour la première fois en partenariat avec un parc national (le parc des Ecrins). Par le passé nous avons organisé des congrès conjoints avec le réseau des Conservatoires d’espaces naturels. Ma première signature en tant que présidente a servi à valider une convention de partenariat entre RNF et chacun des parcs nationaux français. 7 parcs, outre la préfiguration du futur parc national de forêt de plaine, étaient représentés à Monêtier.

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C’est un symbole, et une réalité, auxquels je suis particulièrement attachée. Nous devons impérativement travailler en inter-réseaux pour porter les enjeux des aires protégées en France.  Nous devons définir des actions concrètes à conduire avec les parcs nationaux et les conservatoires d’espaces naturels, mais aussi avec d’autres partenaires : le Conservatoire du littoral, les Grands sites de France….  Nous devons définir ensemble, par exemple, ce que nous entendons par des « espaces de pleine naturalité », pour lesquels un objectif de 10 % du territoire a été fixé. Et nous avons fait savoir à la secrétaire d’Etat Emmanuelle Wargon, qui était présente au congrès, que nous ne comprendrions pas que les aires protégées ne soient pas représentées au conseil d’administration de l’Office national de la biodiversité, qui regroupera à partir du 1er janvier l’Agence française pour la biodiversité et l’Office national de la chasse et de la faune sauvage.

ANES : Emmanuelle Wargon a annoncé une feuille de route pour créer ou étendre une vingtaine de réserves d’ici 2022. Mais des annonces semblables avaient été faites l’an dernier. Avez-vous le sentiment que ces annonces soient suivies d’effet ?

Charlotte Meunier : ce ne sont pas des chiffres « en l’air ». Nous avons 9 projets de création de réserves nationales, et 18 projets d’extension, qui sont tous repérés, localisés, cartographiés.  Une enveloppe de 500 000 € a été dégagée pour financer ce travail de création de nouvelles réserves. Mais évidemment, tout cela n’aura pas de sens si les moyens nécessaires ne sont pas assurés pour gérer ces réserves.  Or jusqu’ici, les moyens ont toujours manqué. La Stratégie de création d’aires protégées (SCAP), énoncée en 2009  et réaffirmée en 2012, fixait un objectif de 2 % du territoire terrestre métropolitain sous protection forte  (réserves naturelles nationales ou régionales, arrêtés préfectoraux de protection de biotope, cœurs de parcs nationaux…) avant 2019. Cet objectif n’a pas été atteint. Qu’en sera-t-il pour le nouvel objectif affiché, de 30 % du territoire sous protection, dont 10 % en « pleine naturalité » ? Un coup d’accélérateur qui ne serait pas accompagné des moyens correspondants constituerait évidemment une déception.

ANES : des moyens pour faire quoi, au juste ?

Charlotte Meunier : nous avons besoin d’appui à l’ingénierie de projets. Il y a des crédits européens, par exemple, que nous avons parfois du mal à mobiliser parce que cela implique de monter des dossiers compliqués, administrativement lourds. Et une fois que les projets sont lancés, il faut un travail de suivi qui nécessite, là encore, des compétences que nous avons du mal à mobiliser. Ce sont avant tout des moyens humains dont nous manquons. Nous avons bien quelques idées sur la façon de financer ces besoins, en matière de fiscalité par exemple, mais chacun sait que ce sont des sujets très délicats…  J’espère que nous pourrons faire, avec les autres réseaux, des propositions en ce sens à l’occasion de la rencontre des aires protégées qui se déroulera à Biarritz fin octobre.

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Propos recueillis
par Jean-Jacques Fresko