Des pêcheurs indonésiens de l’île de Pulau Pari, menacée par la montée des eaux, portent plainte contre le cimentier suisse Holcim pour dommages environnementaux avec l’appui d’une ONG suisse, annonce cette dernière mardi.
La plainte a été déposée lundi dans le canton de Zoug, où se trouve le siège social du géant suisse du ciment et du béton, ont indiqué les représentants de l’ONG Entraide Protestante Suisse (EPER), une organisation religieuse qui milite pour les droits de l’homme et la justice climatique lors d’une conférence de presse. Les plaignants, trois hommes et une femme, avait révélé lundi soir la chaîne allemande RTL, demandent à Holcim de les indemniser pour les dommages déjà causés en raison de ses rejets de CO2 élevés et de participer au financement de mesures de protection contre les inondations qui frappent régulièrement l’île. Ils demandent aussi au géant suisse issu de la fusion en 2015 avec le français Lafarge de réduire ses émissions de CO2. « C’est la première fois qu’un groupe suisse doit répondre juridiquement de son rôle dans les changements climatiques », précise l’ONG dans un communiqué, qui agit avec l’appui d’une autre ONG basée à Berlin et de l’organisation environnementale indonésienne Walhi. Elles soulignent que les pays du Sud qui « ont à peine contribué aux changements climatiques » sont particulièrement touchés par ses effets. Sur cette petite île située au Nord-Ouest de Jakarta, l’élévation du niveau de la mer entraîne une augmentation des inondations qui endommagent les maisons, rues et commerces, affectant les revenus de ses habitants qui vivent principalement de la pêche et du tourisme. « Nous ne contribuons pas à la crise climatique. Ceux qui y contribuent beaucoup, comme Holcim, doivent être tenus responsables », a expliqué un des plaignants qui s’exprimait en visioconférence par le biais d’un interprète. La plainte a été déposée auprès d’une autorité de conciliation, ce qui constitue la première étape d’une procédure civile ordinaire, a expliqué Nina Burri, la responsable des questions d’entreprises et droits humains, lors de la conférence de presse. En 2019, Holcim avait vendu ses activités en Indonésie au cimentier local Semen Indonesia. Mais le groupe fait partie des cinquante entreprises qui émettent le plus de CO2 au monde, argumente l’ONG, qui se réfère à une étude selon laquelle Holcim a émis plus de sept milliards de tonnes de CO2 entre 1950 et 2021.Ce chiffre représente 0,42% de l’ensemble des émissions industrielles mondiales de CO2 depuis 1750, « soit plus du double de ce que l’ensemble de la Suisse a émis sur la même période », poursuit l’ONG, qui estime qu’Holcim « est donc en grande partie coresponsable de la crise climatique et de la situation sur l’île de Pari ». Contacté par l’AFP, le groupe suisse n’a pas souhaité faire de commentaire, précisant cependant qu’il prend les questions climatiques « très au sérieux ». Le groupe affirme avoir fortement réduit son empreinte carbone au cours des dix dernières années et se veut le leader des efforts de décarbonation dans le secteur.