Un décret ouvre la voie aux actions de groupe environnementales, un ouvrage de l’Agence française de la biodiversité fait le point sur la notion de « préjudice écologique » dans les domaines de l’eau et des milieux aquatiques.
« Du dommage écologique au préjudice écologique » : le titre de l’ouvrage que publie l’AFB rend parfaitement compte de l’évolution qui se déroule sous nos yeux. La prise en compte par les juridictions de la notion de préjudice écologique est en effet d’apparition récente : elle a été spectaculairement sanctionnée par la cour de cassation le 25 septembre 2012 dans l’arrêt Erika. Par cette décision, la chambre criminelle de la Cour de cassation acceptait d’indemniser le préjudice écologique subi par une association, la Ligue pour la protection des oiseaux. Cette décision était remarquable, d’une part en ce qu’elle confirmait l’existence, déjà reconnue par la jurisprudence pénale, de ce nouveau type de préjudice, d’autre part parce qu’elle précisait les modalités d’évaluation de ce préjudice. Désormais, le juge qui fait le constat d’un dommage écologique générant un préjudice doit en estimer le montant et en fixer la réparation, au besoin en recourant à une expertise. Il ressort également de la jurisprudence Erika que le préjudice porté à l’intérêt collectif tendant à la préservation de l’environnement, pour lequel certaines personnes morales (les ONG environnementales principalement) sont habilitées à demander réparation, ne se confond pas avec le préjudice subi individuellement par des personnes physiques. Le préjudice écologique y est défini comme un préjudice objectif et autonome, consistant en toute atteinte non négligeable à l’environnement naturel, sans répercussion sur un intérêt humain particulier mais affectant un intérêt collectif légitime.
Le décret publié le 6 mai, en application de la Loi de modernisation de la justice du XXIème siècle, vise lui précisément les dommages subis individuellement par les personnes physiques. Il autorise désormais ces victimes de préjudices écologiques à se regrouper pour introduire une action collective contre l’auteur du dommage écologique. Il faut pour cela que trois conditions soient réunies : plusieurs personnes placées dans une situation similaire subissent un préjudice résultant d’un dommage environnemental : le dommage est causé par une même personne ; le dommage a pour cause commune un manquement de l’auteur du dommage à ses obligations légales ou contractuelles.
Si elle est courante aux Etats-Unis, l’action de groupe est une notion nouvelle en droit français : nul doute que la mise en œuvre de ce décret conduira à de nouvelles évolutions de la réparation du préjudice écologique.