Plafond d’abattage de 40 loups en 2018, indemnisation des éleveurs sous condition: le nouveau plan loup qui veut organiser la « coexistence » entre ces prédateurs de plus en plus nombreux et les troupeaux ne satisfait ni les éleveurs ni les défenseurs de la vie sauvage.
« Il n’y a pas de choix parfait, résumait récemment le ministre de la Transition écologique Nicolas Hulot. Je suis obligé de tenir compte des éleveurs, donc je suis obligé malheureusement de prendre des mesures qui me font mal aux tripes, de dire il va quand même falloir tuer quelques loups », lançait-il ainsi à des enfants dans l’émission Au Tableau sur C8. Résultat, malgré la colère des éleveurs qui dénoncent les attaques de
brebis, le plan publié lundi après plus d’un an de concertations tendues et 25 ans après le retour du loup en France, vise à atteindre 500 loups sur le territoire d’ici 2023, contre 360 environ fin 2017 et 292 en 2016. Dans cet objectif, les scientifiques recommandent de ne pas abattre plus de 10 à 12% de l’effectif chaque année. Ainsi, pour 2018, année de transition, le plan fixe un plafond initial d’abattage de 40 loups, mais ce nombre sera « actualisé » une fois connus les chiffres de population au printemps et porté à 10% de la population. Et à partir de 2019, le plafond annuel sera fixé à 10%, avec la possibilité
pour les autorités de le relever à 12%. Les tirs de prélèvement ne pourront se faire qu’entre septembre et décembre, mais les éleveurs pourront « toute l’année » se défendre « en cas d’attaque », dans la limite de ces 12%.
« Nous avons demandé qu’à chaque attaque, on tue le loup en cause. Cela permet d’éliminer le loup agressif et d’apprendre aux autres ce qui se passe quand on s’approche des troupeaux », a regretté lors d’une conférence de presse la présidente de la FNSEA Christiane Lambert. Ce plan « ne garantit pas le zéro attaque des troupeaux, a renchéri le
syndical agricole dans un communiqué commun avec notamment la Fédération nationale ovine. Force est de constater, une nouvelle fois, que la voix des acteurs du monde rural est ignorée, bafouée et ne compte pas dans ce pays, ont-ils dénoncé, déplorant une ruralité sacrifiée ».
Pour les défenseurs de la biodiversité, c’est le loup qui est « victime du manque de courage politique. Le tir indifférencié de loups est plus qu’inefficace, contreproductif (éclatement des meutes, dispersion, absence d’apprentissage de la cohabitation…) », ont commenté dans un communiqué plusieurs ONG dont WWF et France Nature Environnement. « L’État montre ainsi qu’il est dans une position défensive et qu’au lieu d’assumer un objectif de coexistence, il n’a ni le courage de rappeler le cadre de la loi ni celui d’affirmer qu’il est nécessaire que l’élevage s’adapte à la présence de cette espèce protégée, ont-elles ajouté.
« Nous faisons confiance aux acteurs et aux élus locaux pour dépassionner le
débat et construire ensemble cette coexistence sur le long terme », ont commenté de leur côté Nicolas Hulot et le ministre de l’Agriculture Stéphane Travert.
Espèce protégée, le loup, disparu en France dans les années 1930, est revenu par l’Italie à partir de 1992. Il est désormais présent dans les Alpes et en Provence, dans le sud du Massif central et dans l’est des Pyrénées et ses attaques se sont multipliées, de 1.400 brebis en 2000 à près de 10.000 en 2016. Dans cette optique, le plan prévoit des aides à la protection des troupeaux (bergers pour le gardiennage, chiens, parcs électriques) et le développement de mesures de protection et d’effarouchement « innovantes ». Mesure particulièrement contestée dès l’annonce du projet, les indemnisations des éleveurs seront en revanche désormais soumises à la mise en place préalable de mesures de protection. Une vingtaine de députés LREM de zones de montagne avaient réclamé début février une modification du plan, en particulier de cette mesure, « pas acceptable » selon eux. Le plan plaide d’autre part pour de nouvelles études scientifiques pour mieux connaître et comprendre le comportement du loup et ses mécanismes
d’attaque.