Malgré un sondage montrant que 9 Français sur 10 sont contre la détention d’animaux sauvages comme nouveaux animaux de compagnie, le commerce de ces derniers est florissant dans les pays occidentaux.
La pandémie du Covid-19 a mis un coup de projecteur sur le commerce – légal et illégal – des animaux sauvages, particulièrement en Asie. Mais cette pratique est « très ancienne dans la plupart des sociétés humaines« , comme le rappelle Marie Sigaud, chercheuse à l’Université de Kyoto, dans The Conversation. Il s’agit aujourd’hui d’une manne financière avoisinant chaque année les 100 milliards de dollars, dont 7 à 23 milliards de dollars pour le commerce illégal de la faune sauvage. Et bien mal informé qui penserait qu’elle est l’apanage des Chinois… Les pays occidentaux sont aussi friands d’animaux sauvages, qui rejoignent le marché florissant des nouveaux animaux de compagnie (NAC).
Ainsi, « avec plus de 1,5 milliard d’animaux importés entre 2000 et 2006, les États-Unis sont les plus gros consommateurs d’animaux sauvages vivants », avec près de 15 millions d’iguanes verts importés depuis 1975 et « au moins 800 000 foyers [possédant] un serpent« . Le Japon, lui, a légalement importé « plus de 260 000 oiseaux vivants appartenant à 362 espèces entre 2005 et 2015« . Quant à la France, elle a importé en 10 ans 40 000 tortues russes (Testudo horsfieldii) et près de 25 000 hippocampes dorés (Hippocampus kuda), « deux espèces classées vulnérables face au risque d’extinction« .
Un sondage réalisé par Savanta ComRes en février 2020 a pourtant révélé que 87 % des Français sont contre la détention d’animaux sauvages comme NAC. Réalisé sur 6 137 adultes de six pays européens (France, Allemagne, Espagne, Italie, Pologne et Finlande) et commandité par les associations Eurogroup for Animals et Animal Advocacy and Protection (AAP), le sondage montre une tendance identique dans tous les pays sondés. « La détention de NAC pose aussi problème pour la biodiversité : 68 % des Français interrogés estiment que les NAC sont une menace pour la faune sauvage indigène, ce qui est le cas, détaille la Fondation Brigitte Bardot dans un communiqué. A titre d’exemple, les tortues de Floride déciment les populations de tortues locales comme la Cistude d’Europe. » Les Français interrogés sont 84 % à penser que la détention d’un NAC exotique est dangereuse. « En effet, les animaux sauvages captifs représentent un danger pour la santé publique, comme le montre la crise actuelle du Covid-19, que les scientifiques soupçonnent provenir d’un contact entre l’humain et des animaux sauvages. » Enfin, 91 % des Français interrogés souhaitent que le commerce de NAC exotiques soit mieux réglementé.
Marie Sigaud souligne toutefois que ce commerce est « particulièrement difficile à contrôler« . D’abord « parce que l’aire de répartition d’une espèce peut chevaucher plusieurs pays qui ne vont pas forcément adopter les mêmes mesures de protection. » Par ailleurs, même si une espèce est protégée dans son aire de répartition et interdite de commerce international, elle peut être « légalement commercialisée dans un pays consommateur. Ainsi, les éléphants sont protégés dans la plupart des pays et le commerce international de leur ivoire est l’objet d’un moratoire depuis 1989. Pourtant, sur le territoire japonais le commerce d’ivoire est légal. » La convention sur le commerce international des espèces de faune et de flore sauvages menacées d’extinction (CITES) réglemente le commerce international des espèces sauvages depuis 1975, pour éviter leur surexploitation et leur disparition dans le milieu naturel. Elle compte aujourd’hui 183 pays signataires, mais « certains observateurs s’interrogent » sur son « efficacité« , d’après la chercheuse.