Les Etats doivent accélérer les négociations pour trouver un accord interdisant les subventions en faveur de la surpêche d’ici 2020, date butoir fixée par l’ONU, a prévenu mardi 8 octobre le patron de l’Organisation mondiale du commerce (OMC), relayant le cri d’alarme lancé par des ONG.
« Il est temps de mettre un terme à ces négociations qui durent déjà depuis très longtemps« , a déclaré le directeur de l’Organisation mondiale du commerce (OMC), Roberto Azevedo, à l’ouverture d’un débat sur le sujet d’une interdiction des subventions en faveur de la surpêche. Cette mobilisation générale intervient alors que les négociations piétinent malgré la multitude de propositions, les pays ne parvenant même pas à s’entendre sur la nomination d’un nouveau président du groupe des discussions, après le départ en août du Mexicain Roberto Zapata Barradas. « Une série de mesures urgentes sont donc nécessaires pour inverser cette tendance à l’épuisement des stocks si l’on veut qu’il en reste à l’avenir« , a ajouté M Azevedo. Selon l’ONU, la proportion des stocks de poissons exploités à un niveau biologiquement durable a chuté de 90% en 1974 à 66,9% en 2015. Les discussions à l’OMC sur les subventions à la pêche remontent à une vingtaine d’années. Elles ont été particulièrement actives au cours de la période 2005-2011, sans toutefois aboutir. [ihc-hide-content ihc_mb_type= »show » ihc_mb_who= »1,2,3,4,5″ ihc_mb_template= »1″ ]
L’effort a été relancé après l’adoption par les dirigeants mondiaux des Objectifs de développement durable (ODD) de l’ONU en septembre 2015. Le WWF et la coalition Friends of Ocean Action, réunissant plus de 50 dirigeants issus d’ONG, de la politique et des entreprises sous la bannière du Forum économique mondial, ont également appelé, avec le soutien de l’envoyé spécial de l’ONU pour les océans Peter Thomson et le célèbre documentariste naturaliste britannique David Attenborough, à mettre rapidement fin à ces subventions à la pêche préjudiciables, évaluées à 22 milliards de dollars par an (20 milliards d’euros). Ils estiment que 85% de ce montant bénéficient aux grandes flottes industrielles.
Dans un message vidéo, retransmis au cours de débats à l’OMC, David Attenborough a expliqué que ces fonds « permettent aux bateaux de continuer à pêcher même là où il reste trop peu de poissons pour que la pêche soit rentable« . « Mais tout n’est pas perdu, nous pouvons renverser la situation dès maintenant« , a-t-il ajouté. Un des objectifs de l’ONU fixe à 2020 le délai pour éliminer les subventions qui contribuent à la pêche illicite, non déclarée et non réglementée (INN) et pour interdire certaines formes de subventions qui contribuent à la surcapacité et à la surpêche, en prévoyant un traitement spécial et différencié des pays en développement et des pays les moins avancés. La plupart de ces subventions sont distribuées par « la Chine, l’UE, la Corée du Sud et le Japon« , a détaillé à l’AFP Rémi Parmentier, conseiller du groupe Friends of Ocean Action, qui espère que l’alerte lancée par l’OMC donnera « un coup de fouet » aux négociateurs. La conclusion d’un accord a échoué lors de la 11e Conférence ministérielle de l’OMC à Buenos Aires fin 2017, l’ONG Bloom imputant cet échec à l’Inde, hostile à toute mesure contraignante. Plusieurs modèles d’accord sont sur la table des discussions actuellement à l’OMC, dont un présenté par l’UE, un par les Etats-Unis et un par le Brésil. Selon des sources proches des négociations, la Chine et le Japon ont également prévu de faire des propositions. Présente aux débats à l’OMC, Alice Tipping, de l’Institut International du Développement Durable, a elle jugé que les discussions devaient être élevées « au niveau politique » au vu de l’urgence de la situation. D’autant que lors de la prochaine Conférence ministérielle de l’OMC, en juin 2020 au Kazakhstan, les pays auront d’autres sujets urgents à traiter: la guerre commerciale et la réforme de l’OMC.
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