Les ministres de l’Environnement du G7 ont adopté lundi 6 mai une charte pour la biodiversité, non contraignante, au moment où un groupe d’experts de l’ONU lance un cri d’alarme sur l’état catastrophique de la nature.
Les sept pays les plus industrialisés (France, Canada, Allemagne, Etats-Unis, Italie, Japon, Royaume-Uni) sont parvenus à la rédaction d’un communiqué final commun, après deux jours de discussions dans le cadre du G7 Environnement, mais avec un paragraphe différent pour marquer les divergences avec les Etats-Unis sur le climat. « Andrew Wheeler a vraiment oeuvré pour que nous puissions avoir ce communiqué commun », a assuré le ministre français de la Transition écologique, François de Rugy, en parlant du patron de l’Agence américaine de protection de l’environnement (EPA), qui de son côté a assuré que les discussions ont été « productives ». Pour autant, les Etats-Unis ont refusé de s’associer au paragraphe 25 « sur le fait de rehausser notre ambition en matière de réduction des émissions de gaz à effet de serre » et ont « demandé que soit adjoint un petit texte, qui est donc le paragraphe 26 et qui est leur position propre », a précisé M. de Rugy. Ce paragraphe indique que « les Etats-Unis réitèrent leur intention de se retirer de l’Accord de Paris sur le climat ». « Nous reconnaissons le besoin de mesures transformatrices, à la hauteur du défi mondial posé par la biodiversité, et sommes déterminés à assumer notre part de cette tâche », assure par ailleurs le texte. Le commissaire européen à l’Environnement et neuf pays invités (Mexique, Chili, Niger, Gabon, Egypte, Inde, Indonésie, îles Fidji, Norvège) ont aussi participé à cette réunion à Metz. La charte adoptée par les pays du G7 et une partie des pays invités servira de « socle » aux politiques publiques, a expliqué la secrétaire d’Etat française à la Transition écologique, Brune Poirson. Ce texte non contraignant comporte trois points pour « accélérer et intensifier nos efforts pour mettre fin à la perte de biodiversité », « encourager l’engagement d’autres acteurs » et « soutenir l’élaboration et la mise en oeuvre d’un cadre mondial post-2020 pour la biodiversité », sans aucun objectif précis ou chiffré. A l’automne 2020 doit se tenir la réunion des Etats membres de la Convention de l’ONU sur la diversité biologique (COP15) à Kunming, en Chine, à l’automne 2020. Elle doit fixer un agenda pour protéger la biodiversité dans les années à venir, après l’échec à remplir la plupart des engagements pour 2011-2020. Les responsables politiques pourront s’appuyer sur le rapport publié lundi par le groupe d’experts de l’ONU sur la biodiversité (IPBES). Le constat est sans appel: un million d’espèces animales et végétales sont menacées d’extinction et le déclin de la nature ne pourra être enrayé sans des changements majeurs de société. Là où le G7 reconnaît « les possibilités économiques inhérentes à une bonne gouvernance environnementale » l’IPBES appelle à penser au-delà du PIB comme mesure de la richesse. « Ces déclarations de bonnes intentions (…) ne permettent pas de remettre en cause un modèle économique qui privilégie les intérêts des multinationales », critique Greenpeace dans un communiqué. Pour Lucie Dufour de Réseau action climat (RAC), « ces déclarations d’intention étaient indispensables, mais font l’impasse sur des enjeux clés, comme celui de la fin des subventions aux énergies fossiles ». La France espère « progresser en terme de négociations diplomatiques pour que les engagements soient plus précis » d’ici le G7 fin août à Biarritz, a fait savoir M. de Rugy.
Dans un communiqué publié sur le site du ministère de la Transition écologique suivant l’adoption de la charte biodiversité, les membres du G7 ont prolongé leurs déclarations sur les défis mondiaux quant à l’environnement. Ils s’expriment d’abord sur les inégalités et l’inclusivité dans la transition vers un avenir vert. « Nous reconnaissons […] que la dégradation de l’environnement, les catastrophes naturelles, la perte de biodiversité et autres facteurs extérieurs dont on projette qu’ils soient aggravés par les changements climatiques, atteignent de manière disproportionnée les plus pauvres et les plus vulnérables. Nous soulignons également l’importance d’un dialogue inclusif continu entre générations sur tous les enjeux environnementaux ». Le G7 a par ailleurs reconnu la vulnérabilité des femmes et des filles face aux changements climatiques et à la dégradation de l’environnement, ainsi que leur rôle vital dans la gestion de l’environnement et pour accélérer la transition vers la durabilité. Concernant le rôle de la science et de la recherche, le G7 souligne « l’importance d’une coopération étroite entre les communautés scientifiques et le secteur privé en tant que moteur du développement durable. Les politiques de durabilité tournées vers l’avenir doivent s’appuyer sur l’innovation et des modèles d’entreprise qui réduisent l’impact environnemental, en particulier des secteurs très polluants, tout en fournissant de meilleurs biens et services à la population mondiale croissante. » Quant à l’intégrité des écosystèmes marins et terrestres, le G7 a reconnu la haute importance des aires protégées écologiquement représentatives et bien connectées, l’augmentation de leur surface et l’amélioration de leur gestion en tant que de besoin, ainsi que de la lutte contre la déforestation, la dégradation des écosystèmes et la désertification. « Nous reconnaissons également que la conservation et l’utilisation durable de la biodiversité exigent une action sur le terrain. Cela inclut tant les paysages terrestres (visant une agriculture durable et une gestion durable des forêts, des sols et des terres, y compris la réduction de l’étalement urbain, l’intégration de la nature dans les villes, la réutilisation des friches industrielles ou le retour à un état naturel des terres dégradées) que les paysages marins (visant une pêche durable et une gestion durable des océans, notamment une planification spatiale maritime). »