Volkswagen a suspendu mardi un de ses dirigeants de ses fonctions après la révélation de tests sur les singes et les humains dans le secteur automobile allemand, première conséquence de ce scandale qui « choque » l’UE.
Le numéro un mondial de l’automobile a suspendu son lobbyiste en chef, Thomas Steg, pour le rôle qu’il a joué, de son propre aveu, dans l’organisation des tests d’émissions polluantes sur des singes visant à prouver l’innocuité du diesel. Il « est libéré de ses responsabilités jusqu’à ce que la lumière soit fait sur les évènements », a indiqué le groupe, assurant qu’il ne s’agissait que d’un début. Le chef du gouvernement de l’Etat régional où est basé VW, Stephan Weil, également gros actionnaire public du constructeur, a salué une sanction « justifiée et inévitable ». M. Steg, qui avait la charge des relations publiques et institutionnelles du groupe automobile, a admis le même jour dans le quotidien Bild avoir été informé des essais destinés à étudier les effets de la pollution des moteurs diesel Volkswagen, truqués à l’époque pour paraître moins polluants. Pour sa défense, il a affirmé avoir empêché que ces tests soient réalisés sur des humains, via l’EUGT, un organisme de recherche financé par Volkswagen, ses concurrents Daimler, BMW et l’équipementier Bosch. « Avec le recul, cette étude n’aurait jamais dû avoir lieu, qu’il s’agisse d’hommes ou de singes. Ce qui s’est passé n’aurait jamais dû arriver, je le regrette vraiment », a encore souligné M. Steg, qui fut dans le passé porte-parole du chancelier social-démocrate Gerhard Schröder.
Les constructeurs allemands, à commencer par Volkswagen, sont sous intense pression politique dans ce dossier. Le gouvernement allemand a qualifié lundi ces expériences « d’injustifiables d’un point de vue éthique » et annoncé la convocation des constructeurs devant la commission d’enquête ministérielle en charge du scandale des moteurs diesel truqués, dont le secteur ne s’est toujours pas dépêtré. De son côté, la Commission européenne s’est dit « choquée » et a espéré que les autorités allemandes enquêteront comme promis. L’ONG Greenpeace a elle mis en cause « une industrie automobile frauduleuse » et « un gouvernement fédéral passif » responsables à ses yeux d’un bilan « effrayant ». Selon, l’organisation, 10.000 personnes meurent chaque année en Allemagne à cause du dioxyde d’azote (NO2) rejeté par les véhicules diesel. Lundi soir, le patron de Volkswagen a été contraint de sortir de son silence. Matthias Müller a qualifié de « repoussants » les tests sur les singes en 2014. « Il y a des choses qui ne se font tout simplement pas. (…) Toutes les conséquences nécessaires (devront être) tirées », a-t-il prévenu à Bruxelles. Le premier pan de ce scandale, dévoilé par le New York Times, porte sur des tests menés aux Etats-Unis sur dix singes en 2014, enfermés face à des dessins animés pendant qu’on leur faisait respirer la fumée émise par une Beetle, successeur de la Coccinelle, modèle phare de Volkswagen.
La presse allemande a enfoncé le clou lundi en détaillant d’autres tests, cette fois en Allemagne et sur des êtres humains. Un institut hospitalier d’Aix-la-Chapelle, mandaté par l’EUGT, a ainsi fait inhaler en 2013 et 2014 du dioxyde d’azote (NO2) à 25 personnes volontaires en bonne santé, à des concentrations variées. Daimler s’est « distancié expressément de l’étude et de l’EUGT », selon un porte-parole interrogé par l’AFP, tandis que BMW et Bosch ont démenti y avoir participé. Aux Pays-Bas, le quotidien de référence de la presse scientifique, NRC, a cherché lui à minimiser la polémique. Il a affirmé mardi que ce genre d’expérimentations, sur des animaux comme sur des humains existent « depuis des années déjà » dans le pays, qualifiant le scandale de « tempête dans un verre d’eau ». Mais la controverse arrive dans un contexte particulier, celui d’une crise déjà aiguë de confiance qui frappe depuis 2015 les grands constructeurs allemands après le trucage à grande échelle de leurs moteurs diesel et le rappel de millions de véhicules. Le ministre allemand des Transports Christian Schmidt a accusé les groupes automobiles d’avoir cherché par ces expériences et études à assurer « leur promotion » pour minimiser auprès du public les effets des émanations polluantes.