Les toiles d’araignées géantes mises en scène par le plasticien argentin Tomas Saraceno ont pris possession du Palais de Tokyo, pour une exposition spectaculaire à l’ambition écologique et cosmique.
Dès l’entrée, au long d’une première salle plongée dans la pénombre, sur fond de légère vibration sonore aussi continue qu’étrange, des entrelacs infinis de fils plongent le visiteur très loin de la ville : 76 toiles d’araignée forment l’œuvre « Webs of At-tent(s)ion », comme autant de sculptures élégantes et flottantes. L’exposition, intitulée On Air, s’est ouverte cette semaine et durera jusqu’au 6 janvier. C’est une carte blanche pour Saraceno, artiste passionné de sciences et d’écologie, et un des évènements de l’automne artistique. Une centaine d’araignées hébergées dans le Musée a permis de donner naissance à diverses toiles. Dans une salle, protégées par 90 cubes transparents, autant de toiles sont tissées par des espèces variées. Elles réagissent différemment à la vibration de la musique dans la manière dont elles tissent leur toile. L’installation « Event Horizon » permet d’entendre les vibrations émises par une espèce d’araignée, sourde et aveugle, vivant dans les sous-sols du Palais de Tokyo. Dans « Space Elevator », les araignées tissent leurs toiles entre des ballons flottants. Leurs habitats suspendus devraient inspirer les humains pour sauver la planète, juge l’artiste utopiste.
Le message de Saraceno, commente à l’AFP le directeur du Musée Jean deLoisy, est que « nous percevons peu de la réalité de l’univers: ce qui est invisible, les molécules, les particules, les poussières cosmiques, les courants.Il faut que l’humain élargisse cette connaissance de la nature et de la matière, pour redevenir plus humain. L’œuvre de Saraceno porte son attention sur les mouvements incessants du cosmos et du microcosme, résume Jean de Loisy. Elle montre que les toiles d’araignée ne sont pas que les productions de l’animal, mais le déploiement de son corps et de son système perceptif»..
Tomas Saraceno, 45 ans, qui travaille surtout à Berlin avec de nombreux collaborateurs, aime à parler de « collaboration avec les araignées », parle des ressources du « biomimétisme » et assure que « l’homo flottantus (l’homme qui flotte dans l’espace) doit succéder à l’homo economicus ». Sur un panneau, l’artiste arachnophile a inscrit « Aéronautes: unissez-vous: pour une nouvelle époque sans frontières et sans combustibles fossiles », alors même que les experts climat de l’ONU (Giec) viennent de tirer la sonnette d’alarme sur les risques accrus de réchauffement climatique.