Créé dans l’urgence alimentaire des lendemains de la Seconde Guerre mondiale, l’Institut national de la recherche agronomique (INRA) a été porté par l’idée qu’une recherche scientifique publique sur le pilotage du vivant sous toutes ses déclinaisons était d’une importance majeure pour la reconstruction de la position française dans le monde.
Cet ouvrage, fondé sur une documentation originale et des témoignages d’acteurs, explore les soixante-dix années d’existence de l’institut et met en perspective les interactions entre le scientifique et le politique.
Alors que le monde industrialisé pensait en avoir fini avec la question des subsistances, la Seconde Guerre mondiale replace l’agriculture et l’alimentation au cœur des enjeux de la reconstruction. L’Europe de l’Ouest, ravagée et affaiblie, se tourne alors vers les États-Unis pour penser une modernisation capable de fonder une nouvelle expansion. En France, l’après-guerre est ainsi le théâtre d’une profonde transformation du monde rural sous l’effet de la diffusion volontariste du « progrès », instrument d’une mise à niveau de la productivité agricole au service de la restauration de la position française dans le monde. Dans ce contexte, la création en 1946 de l’Inra constitue un moment crucial de la rencontre entre science et politique, dans la quête d’une voie de développement qui mobilise les outils des sciences du vivant pour en rationaliser l’exploitation.
L’histoire de l’Inra, entre science et politique
Pierre Cornu, Egizio Valceschini et Odile Maeght-Bournay
Edition Quæ
Parution janvier 2018
464 pages
29,00 €
D’abord conçu comme un institut de recherche et d’expérimentation dévolu à la seule agriculture, l’Inra élargit peu à peu ses missions, déployant des compétences nouvelles sur les industries agroalimentaires, la nutrition, la biologie moléculaire ou encore l’environnement.
Serviteur zélé des politiques publiques de modernisation, l’institut s’affirme dans le concert des grands opérateurs de recherche, aux côtés du CNRS, de l’Inserm et de l’Institut Pasteur. Mais confronté à l’essor de la recherche privée, à l’effacement du volontarisme d’État et à la montée de la contestation des sciences et des techniques, il se trouve précocement contraint, dans les années 1980 et surtout 1990, à repenser en profondeur son identité et son rôle, dans la prise de conscience croissante de l’interconnexion des questions agricoles, alimentaires et environnementales.
Au cœur des enjeux de l’économie de la connaissance du monde contemporain, la trajectoire historique de l’Inra représente une véritable énigme, observatoire privilégié de la genèse d’une gouvernance globale du vivant et de la sécurité alimentaire. Fondé sur une documentation originale et sur un recours à la mémoire des acteurs, le présent ouvrage constitue la première synthèse historique sur cet organisme de recherche.