🔻 Des arrêtés pour réguler les espèces « nuisibles » annulés

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Le tribunal administratif de Rouen a annulé des arrêté des préfets de Seine-Maritime et de l’Eure qui autorisaient l’abattage de 1.430 renards en cinq mois, mais aussi d’oiseaux tels que les corbeaux freux et les corneilles noires, pendant les derniers confinements.

Le juge des référés du tribunal avait suspendu en septembre 2020 un arrêté du 20 juillet 2020 qui autorisait « la régulation » du renard par les lieutenants de louveterie de la Seine-Maritime de juillet à décembre 2020. Vendredi la justice a annulé l’arrêté. Le tribunal a rejeté un à un les arguments de la préfecture. D’abord l’indice kilométrique d’abondance (IKA), qui consiste à dénombrer le nombre d’individus par kilomètre carré, est pour les renards « inférieur à la moyenne nationale et demeure, malgré une légère hausse en 2019, stable dans le département de la Seine-Maritime« . Ensuite les dégâts importants causés par le renard aux élevages avicoles dans le département mis en avant par l’administration ne sont pas démontrés selon les juges. Le préfet évoquait en outre un « risque de propagation de maladies transmissibles à l’homme« . Mais « l’échinococcose alvéolaire, si elle s’avère être particulièrement dangereuse pour l’espèce humaine, demeure une maladie parasitaire rare et stable en France« , souligne le tribunal. Surtout, « la régulation du renard dans le but de diminuer les risques de contamination est inefficace » car « elle réduit la prédation des petits rongeurs qui demeurent, majoritairement, responsables de la transmission des zoonoses« , selon le
jugement. Quant à la « gale sarcoptique« , « il ressort des pièces du dossier » que c’est « une maladie bénigne qui se transmet rarement à l’homme et dont la guérison est spontanée« . Ces procédures font suite à des recours déposés par les associations One Voice et la Ligue de protection des oiseaux (LPO).

Ces dernières avaient également saisi la justice concernant la régulation des espèces classées « susceptibles d’occasionner des dégâts » (ESOD) pendant la période de confinement de l’automne 2020. En application du décret du 29 octobre 2020, les activités de chasse étaient alors interdites, à compter du 30 octobre 2020, sur l’ensemble du territoire national afin de lutter contre l’épidémie de covid-19. Les préfets pouvaient autoriser la régulation des ESOD au regard de l’intérêt général qui s’attache à la préservation de l’équilibre agro-sylvo-cynégétique. Toutefois, eu égard au risque sanitaire encouru, les activités ainsi autorisées devaient être strictement adaptées et proportionnées à la nécessité de protéger les cultures, les forêts et les biens. « Une telle exception aux mesures de confinement ne pouvait, dans ces conditions, être justifiée par la seule circonstance qu’une espèce animale est qualifiée d’ESOD« , rappelle la LPO dans un communiqué.

Or les ESOD concernées par les instructions en litige dans l’Eure et la Seine Maritime, en particulier les corbeaux freux, les corneilles noires, les pigeons ramiers et les étourneaux sansonnets, « ne provoquent pas, en cette période de l’année, alors que la germination des cultures a débuté, des dégâts aux productions agricoles et forestières ainsi qu’aux biens nécessitant qu’il soit procédé, pendant le confinement, et pour chacune des ESOD concernées, à des actions de régulation. » Suite à un recours déposé par la LPO et l’ASPAS, le Tribunal Administratif de Rouen a donc considéré que poursuivre ces opérations de régulation pendant la durée du confinement de novembre 2020 n’était pas justifié par l’intérêt général, au regard de l’objectif de santé publique de limiter les déplacements de personnes et de l’absence de démonstration de dégâts significatifs ou de prolifération des espèces concernées en cette période de l’année. Les 2 arrêtés ont donc logiquement été annulés pour les départements de l’Eure et de la Seine Maritime par 2 décisions du Tribunal Administratif en date du 25 juin 2021.