La Commission nationale du débat public a publié les résultats du débat public sur le projet minier de la « Montagne d’or » en Guyane. Elle fustige le manque de coopération du maitre d’ouvrage ainsi que la faisabilité technique du projet, et lui oppose une opinion publique globalement défavorable.
Les résultats du débat public sur le projet minier « Montagne d’or » en Guyane, tenu entre le 7 mars et le 7 juillet 2018, ont été rendu publics dans un bilan de la Commission nationale du débat public (CNDP), où la Présidente Chantal Jouanno ne mâche pas ses mots. La CNDP rappelle d’abord les circonstances dans lesquels s’est effectué le débat public, auquel le maître d’ouvrage (la compagnie minière Montagne d’or) était réfractaire « les nombreux entretiens de préparation du débat par la Commission particulière du débat public (CPDP) ont […] démontré une très grande méfiance de la population à l’égard du maître d’ouvrage et de fortes attentes quant au débat public. Le soutien d’une partie des élus et des milieux économiques au projet, comme l’argument d’un portage totalement privé, ne suffisent pas à légitimer ce projet. Certains décideurs publics ou privés n’ont toujours pas compris que la légitimité légale n’est pas la légitimité sociale. »
Ainsi, le boycott d’une réunion organisée dans un village amérindien était une « grave erreur du maître d’ouvrage ». La sourde oreille de ce dernier, et sa volonté de discréditer les populations autochtones est, selon la Présidente de la CNDP, « en totale contradiction avec les principes du débat public ». Par la suite, la CNDP affirme que les opinions exprimées pendant ce débat public ont été globalement hostiles au projet, fustigeant un projet « mal posé et mal porté par ses promoteurs ». Pour le WWF, le constat est sans appel : « le projet Montagne d’Or ne peut se faire car il est surdimensionné techniquement et refusé par la population. C’est ce que la CNDP indique en expliquant que ‘plusieurs questions techniques interrogent fortement la faisabilité du projet’ et que ‘le maître d’ouvrage n’a pas su rassurer sur sa capacité à maîtriser les risques inhérents à ce type de projet industriel’. » En effet, la faisabilité technique de la « Montagne d’or » repose sur l’aménagement de la piste, longue de plus de 120 kilomètres dont il n’est pas certain qu’elle puisse supporter durablement le volume du trafic et l’approvisionnement énergétique du complexe industriel envisagés. L’association environnementale pointe par ailleurs qu’aucune des conditions fixées par Emmanuel Macron avant l’été n’est réunie pour que le projet minier s’effectue dans de bonnes conditions : « rejet du projet par la population, mine qui ne peut être considérée comme “responsable” car à ciel ouvert, contradiction totale avec nos engagements internationaux sur l’environnement, choix désastreux en termes de développement (gouffre d’argent public par rapport au nombre d’emplois créés). »
La CNDP pointe également le manque d’évaluations environnementales précises : « la question des impacts environnementaux n’a pu être correctement éclairée faute d’étude d’impact. » L’association France Nature Environnement (FNE), dont la saisine avait contraint le maître d’ouvrage à respecter son obligation légale de demander un débat public avec les citoyens, retient quant à elle qu’il n’y a pas de consensus territorial ou national sur le principe de l’exploitation des mines d’or. « Une des conclusions du débat renvoie vers une question essentielle : doit-on se lancer dans une politique d’exploitation aurifère industrielle en Guyane ? Est-ce le type de développement qui est souhaité pour ce territoire ? » D’après l’association, les habitants de Guyane n’ont pas été convenablement interrogés sur la nécessité de réelle de telles exploitations. « Pourtant, les populations guyanaises ont clairement montré leur intérêt et leur souhait de contribuer plus activement à ce réel choix de société, affirme Rémi Girault, président de Guyane Nature Environnement. Nous demandons donc un débat sur l’exploitation de l’or en Guyane, dont les conclusions du débat public soulignent l’utilité en préalable à toute décision sur ce projet de mine de la Montagne d’or ».