Qui sont les séparatistes ?

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Il y a à peine plus d’un an, le Parlement adoptait la loi « confortant le respect des principes de la République et de lutte contre le séparatisme ». Cette loi renforce le contrôle des associations susceptibles de « tenir des discours contraires à la République » et précise qu’« en cas d’atteinte à la dignité de la personne ou lorsque l’association se livre à des pressions psychologiques ou physiques sur les personnes » l’association peut être suspendue de manière conservatoire puis dissoute.

A Caussade (Lot-et-Garonne) des agriculteurs membres de la Coordination rurale -parmi lesquels le président de la Chambre d’agriculture du département- ont édifié en 2019, en toute illégalité, une retenue de 920 000 m³ d’eau. Cinq décisions de justice ont confirmé l’illégalité de l’ouvrage. Ses promoteurs ont été condamnés à des peines d’amende et de prison avec sursis.

Mais le barrage est toujours là.

Les délinquants qui l’ont érigé, et qui se sont filmés sabrant le champagne pour « l’inauguration » de la digue illégale (qui présente en outre des défauts de sécurité) s’opposent par la violence à l’application des décisions de justice, qui enjoignent de remettre en état le site, allant jusqu’à mettre en place des barrages filtrants pour empêcher l’accès du site à tout fonctionnaire d’État ! Ils agissent par la menace et l’intimidation physique à l’égard des opposants : « vous nous ferez plus chier quand vous serez au fond du lac »… « Tenez-vous prêts et le moment venu, venez défendre ce lieu sacré. Il y avait Lourdes, il y aura Caussade »… « L’eau du lac irriguera nos champs, comme le sang irrigue notre corps, vitaux tous les deux. Si l’une est versée, le nôtre le sera aussi ». Dans le genre « pressions psychologiques ou physiques sur des personnes », il paraît difficile de faire plus explicite. Et pour ce qui est des valeurs de la République, voilà une manière très particulière de les respecter…

Bizarrement, le ministre de l’intérieur Gérald Darmanin, ardent promoteur de la loi contre le séparatisme, ne semble pas y voir quoi que ce soit de répréhensible. Et n’a jamais évoqué la possibilité de suspendre, encore moins de dissoudre, la Coordination rurale.

Il est beaucoup plus allant quand il s’agît de traquer les manifestants anti-bassines, qu’il qualifie sans détour d’« écoterroristes ». Au motif qu’au cours d’un rassemblement auquel participaient 6000 personnes le mois dernier à Sainte-Soline (Deux-Sères) des dégradations ont été constatées, des manifestants contre lesquels aucune infraction n’est retenue sont traqués, convoqués, et mis en cause pour « participation à un groupement formé en vue de commettre des dégradations et des violences ».

Petit quiz récapitulatif. Qui peut-on qualifier de « séparatiste » ? Réponse a : les citoyens qui exercent leur droit constitutionnel de manifester. Réponse b : les factieux qui défient les décisions de justice et profèrent des menaces de mort. Réponse c : le ministre de l’Intérieur qui réprime les premiers et cajole les seconds.

Deux réponses possibles.