Une récente étude publiée dans la revue Environmental Science & Technology montre que les oiseaux marins ont évolué de sorte à contrecarrer les effets du méthylmercure, neurotoxique puissants auquel ils sont naturellement exposés.
Les milieux marins sont fortement menacés par les polluants globaux issus d’émissions industrielles comme le mercure. Ce dernier est transporté par voie atmosphérique et par les courants océaniques. Après transformation chimique comme c’est le cas dans l’industrie, le mercure se retrouve sous sa forme méthylée dans l’eau ou dans les sédiments, il s’agit du méthylmercure. Sous cette forme, cet élement devient toxique et facilement absorbable. Sa teneur s’élève au fil de la chaîne alimentaire, ce qui fait que les prédateurs supérieurs de haut niveau trophique comme les oiseaux marins sont naturellement fortement exposés au méthylmercure. Une récente étude se veut rassurante quant à l’exposition des oiseaux marins à ce puissant neurotoxique puisqu’elle démontre qu’ils ont su évoluer pour contrecarrer les effets de ce polluant.
Des chercheurs de La Rochelle Université en collaboration avec l’Université de Grenoble Alpes et l’Université de Nantes ont tenté de comprendre comment les oiseaux marins arrivaient à concilier alimentation et forte exposition à cet élément. Chez ces espèces, le méthylmercure se fixe sur la kératine de leurs plumes. Une partie de ce polluant est donc éliminée à chaque fois que le plumage est renouvelé. Seulement, les recherches publiées dans la revue Environmental Science & Technology montrent que cette élimination périodique n’est pas suffisante pour contrecarrer les effets néfastes du neurotoxique. Les résultats révèlent cependant que les oiseaux marins ont évolué et sont capables de détoxifier le méthylmercure.
Les oiseaux marins étudiés (pétrels géants) ont développé un mécanisme de minéralisation qui consiste à associer le mercure à un autre élément chimique, le sélénium, pour former des granules de séléniure de mercure insoluble (HgSe) appelé tiémannite. La tiémannite -déjà été observée dans le foie des mammifères marins- a été identifiée pour la première fois dans le foie et des tissus extra-hépatiques (muscle, reins, cerveau) du pétrel géant. L’étude note que l’abondance de HgSe (forme non toxique du mercure) s’accroit avec la concentration de mercure. Contrairement aux autres organes, le cerveau des pétrels géants a une concentration faible en mercure et un tiers se trouve sous la forme de séléniure de mercure insoluble. Ces faibles concentrations ainsi que la large proportion de mercure sous sa forme non toxique (HgSe) suggèrent que la détoxification (déméthylation) du méthylmercure dans les différents tissus des oiseaux analysés limite son accumulation dans le cerveau où il est ensuite efficacement déméthylé. Tout ce processus permet aux pétrels ne limiter l’impact du neurotoxique.