Transition écologique : le rapport Canfin oublie la biodiversité… (2 mn 30)

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Comment financer la transition énergétique ? Un rapport commandé par Nicolas Hulot à Pascan Canfin (WWF) et Philippe Zouati (Finance for tomorrow) et remis la semaine dernière à François de Rugy et Bruno Le Maire, recommande de développer les partenariats public-privé pour lever 10 milliards d’euros chaque année. La biodiversité en est la grande absente…

Comme le rappelait Nicolas Hulot en démissionnant, la France ne respecte pas les engagements de baisse des émissions de CO2 pris dans le cadre de l’Accord de Paris. Il est donc indispensable d’investir davantage dans les solutions de la transition écologique. Pour y parvenir les auteurs du rapport, réalisé avec l’appui de l’ADEME, préconisent la création de France Transition, un outil permettant de mobiliser 10 milliards d’euros d’investissements privés dans la transition écologique, par exemple l’isolation des logements, l’agro-écologie ou encore la méthanisation, via le développement de mécanismes de partage de risques.

Il s’agit de lancer un Plan Juncker vert à la Française (Mis en œuvre depuis 2015 et prolongé jusqu’en 2020, le plan d’investissement pour l’Europe, dit « plan Juncker », vise à relancer l’investissement dans les pays de l’Union européenne), avec un effet de levier massif : pour 1 euro de dépense budgétaire le rapport montre qu’il est possible de générer 20 euros d’investissement verts dans les territoires qui en ont cruellement besoin. 

Les rapporteurs formulent 5 recommandations qui permettraient selon eux de parvenir à ce résultat :

  • Recommandation 1 : réunir une équipe d’investissement publique dédiée à la transition énergétique et écologique dans une démarche unique : France Transition
  • Recommandation 2 : développer au niveau de France Transition une doctrine pour l’usage des instruments financiers publics-privés de partage de risques
  • Recommandation 3 : concentrer les interventions de France Transition sur le déploiement de la transition, et la doter d’une première enveloppe de financement de 1 milliard d’euros permettant de générer 10 milliards d’investissements privés sur 3 ans, soit entre 10% et 30% des besoins d’investissement de la Stratégie nationale bas carbone et de la Programmation pluriannuelle de l’’énergie.
  • Recommandation 4 : Optimiser les interventions de France Transition en cohérence et coordination avec l’Union Européenne et le futur dispositif Invest EU
  • Recommandation 5 : créer les conditions d’une meilleure collaboration des secteurs privé et public pour le financement de la transition écologique.

« L’Etat a trois rôles majeurs à jouer, explique dans Le Monde Pascal Canfin. D’une part, s’assurer de la cohérence des politiques publiques avec les grands objectifs posés par l’accord de Paris (2015) sur le climat. D’autre part, faire levier en tant qu’investisseur. L’essentiel du financement nécessaire à cette transition doit provenir des investisseurs privés, mais, pour le déclencher, l’Etat doit partager un peu de risques avec eux – ce qui n’est pas le cas aujourd’hui. Troisième rôle enfin : celui de chef d’orchestre. Il faut que l’Etat réunisse les musiciens de la transition – et ils sont nombreux – dans un même ensemble instrumental, afin que soient créés les outils, les consensus et les mobilisations nécessaires ».

Problème : à l’exception d’une mention de l’agro-écologie, le rapport limite strictement la transition écologique à la transition énergétique. La protection de la nature, elle, en est totalement absente. Ainsi, lorsqu’il passe en revue les institutions qui concourent (financièrement) à la transition, le rapport mentionne l’ADEME, mais oublie l’Agence française pour la biodiversité et l’ONCFS, qui constitueront prochainement le futur Office national de la biodiversité. De même, la maîtrise de l’artificialisation des terres, la compensation écologique des aménagements ne sont mentionnées nulle part. De façon significative, le chapitre consacré à l’action de la Caisse des dépôts et consignations (CDC) et aux instruments financiers qu’elle déploie ne cite pas sa filiale CDC-Biodiversité, qui finance et organise le volet « compensation » de la séquence « Eviter-réduire-compenser » des projets d’aménagement…

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