De nouvelles plantations de palmiers à huile redessinent les frontières de l’Amazonie

Photo d'illustration ©Sarangib de Pixabay

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La culture du palmier à huile connaît un essor considérable depuis une dizaine d’années dans l’État reculé de Roraima, dans le nord du Brésil. La volonté de produire du biocarburant entraîne une perte de forêt importante et menace la santé des peuples autochtones.

Dans l’État de Roraima au nord du Brésil, la culture du palmier à huile s’est développée à vitesse grand V dans le cadre d’un programme de production de biocarburants. En 2020, une décennie après que les premières rangées de palmiers à huile ont pris la place de la forêt tropicale dense, les plantations couvraient quelque 10 107 hectares dans les municipalités de Rorainópolis, São João da Baliza, Caroebe et São Luiz. Alors que les entreprises d’huile de palme opérant dans la région soutiennent qu’elles ne déforestent pas, les critiques affirment qu’elles contribuent à une augmentation de la demande de terres rases, poussant les éleveurs de bétail, les producteurs de soja et les spéculateurs financiers à s’enfoncer davantage dans la forêt.

En plus de devoir faire face à une perte importante de la forêt, les défenseurs des peuples autochtones s’inquiètent des répercussions que l’arrivée des élevages, de l’agriculture et de nouvelles infrastructures peuvent avoir sur les communautés. Ils craignent notamment une exposition importante aux pesticides dont sont arrosées les plantations et les eaux de ruissellement des usines de transformation qui se retrouvent fréquemment dans les sols et les sources d’eau. Ils craignent aussi que les nouveaux arrivants transmettent le virus du Covid aux peuples vulnérables.

Le site d’informations Mongabay rapporte que pendant des années, l’isolement de la région de Roraima lui a permis d’éviter la déforestation qui sévit dans d’autres États brésiliens comme le Pará et le Mato Grosso. « Près de 80 % de la forêt tropicale de Roraima est encore intacte, malgré la progression rapide de l’agriculture et de l’élevage de bétail ces dernières années », explique le média. Des données satellitaires de l’université du Maryland (UMD) visibles sur Global Forest Watch montrent cependant que la pression sur les forêts de Roraima ne cesse de croître. Entre 2008 et 2020, l’État a perdu 850 000 hectares de couverture arborée, soit 4,7 % de ses forêts ; le taux de déforestation a bondi de 216 % en 2019, atteignant de nouveaux sommets avec 61 700 hectares de forêt perdus. Le défrichage des terres aussi devient plus important. Depuis début 2021, l’UMD a enregistré 46 881 alertes de perte de couvert arboré dans cette région – dont 65 % ont été enregistrées dans la semaine du 15 mars. Ces alertes peuvent aussi bien refléter la perte de couvert dans les plantations d’arbres ainsi que le défrichement de la forêt naturelle.